L'avis de Paul :
Courte bande-dessinée d' Ingrid Chabbert (auteure) et
Clémentine Pochon (dessinatrice) et éditée par Les Enfants Rouges, Luna la Nuit
narre l'histoire de la petite Luna, âgée d'une dizaine d'années. Son quotidien,
marqué par d'angoissants trajets en métro et de tristes jours d'école, sa peur
de la nuit et la solitude de Luna, dont les seuls accompagnateurs sont des
spectres toujours présents à ses côtés, créatures dessinées comme des ombres
aux longues mains griffues et ayant pour la petite fille la fascination peu
rassurante du prédateur pour sa proie, tout cela est peint dans ce sombre
récit. Son malheur aussi ; premièrement expliquée par sa mère alitée, semblant
être dépressive et ne répondant pas aux tentatives de la sortir de son apathie
de sa fille. L'arrivée de Marie, sa demi-soeur, pourra peut-être lui permettre
de s'échapper quelque peu de ce quotidien si oppressant ; car des moments de
complicité, lors des goûters qu'elles passent ensembles notamment, vont égayer
la vie si morne de Luna. Mais Marie aussi a peur de la nuit, qui semble être pour
elle si douloureuse que Luna l'entend pleurer dans sa douche le matin. Que
cache donc cette indicible souffrance, partagée par les deux enfants ?
Luna la Nuit est bien noir ; sombre du début à la fin, il
demande un certain courage à la lecture. Ses dessins, si peu colorés,
soulignent la tristesse du personnage. D'une remarquable et incontestable
qualité - brillant dirait-on - ce texte, à l'apparence innocent, met en jeu des
éléments très importants que sont la capacité des parents à choisir entre
l'acceptation et la lutte et la tristesse et le désarroi chez les enfants. Les
deux thèmes bien menés, de bout en bout ; mais peut-être ne nécessitent-ils pas
de passer par des éléments aussi complexes, malsains et lourds de souffrance
que ceux utilisés par Ingrid Chabbert... Malgré cette facilité scénaristique,
cet argument massue pourrait-on dire (et ici je pêche par subjectivité ; car
d'autres que moi accepteront à tort ou à raison, question de goût, cette
richesse des tourments qu'endurent les deux enfants) ne gâche pas l'ouvrage ;
c'est un texte de grande qualité. Aimera qui voudra.
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